Surveillance des patients intoxiqués
L’intoxication est l’état d’une personne empoisonnée par un ou des médicaments ou d’autres substances toxiques. L'ingestion de médicaments incompatibles provoquent des intoxications mixtes. Presque toute substance chimique peut s’avérer poison si elle est administrée à une dose toxique, et ce, peu importe la quantité. La substance peut être toxique, qu’elle ait été ingérée, injectée ou inhalée, ou encore le patient peut simplement y avoir été exposé.
Les intoxications peuvent être intentionnelles ou accidentelles.
Les enfants sont souvent victimes d’intoxications accidentelles parce qu’ils ont l'intention à mettre dans leur bouche ce qu’ils trouvent curieux ou attirant.
Les intoxications représentent un problème mondial de santé publique.
Selon l’Organisation mondiale de la Santé, environ 193 460 personnes sont décédées en 2012 d’une intoxication involontaire.
Les patients atteints d’un trouble de santé mentale et qui avaient consommé des substances psychoactives ont recouru à l’urgence à une fréquence de 5,4 visites par an.
Relation thérapeutique
La panique provoquée à cause de l'intoxication chez le patient, ses proches et les témoins augmente la difficulté de procéder à l’évaluation du patient à son arrivée à l’urgence.
Traiter des patients qui se sont volontairement intoxiqués ou blessés soulève un défi émotionnel, de l’ambivalence, de l’impuissance et souvent des attitudes négatives chez l’infirmière envers ses patients.
Le peu de temps à consacrer à un patient à l’urgence ne facilite pas la création d’un lien de confiance.
Quand on impose des mesures restrictives aux patients telles une garde préventive et des contentions physiques ou chimiques, ils considèrent leurs droits brimés. Restreindre l’accès à leurs effets personnels et à leurs vêtements constitue aussi une atteinte à leur liberté. Dans ce contexte l’infirmière doit prendre le temps d’écouter le patient pour établir avec lui un lien sur le plan humain et ne pas le voir seulement comme un ensemble de symptômes.
Le manque de ressources communautaires vers lesquelles les patients ayant un trouble de santé mentale ou un trouble lié aux substances psychoactives pourraient se diriger, le phénomène des intoxications le met en évidence.
Évaluation
Les patients intoxiqués posent des défis aux cliniciennes dès leur arrivée à l'urgence.
Les manifestations de l'empoisonnement varient d’un cas à un autre.
Habituellement les patients sont inconscients, léthargiques, agités. Ils peuvent présenter des convulsions ou nécessiter une assistance respiratoire. Souvent, l’équipe médicale ne connaît ni la substance ingérée ni la quantité, tout comme elle en ignore le stade de métabolisation et la concentration sérique.
Identifier l’agent toxique est important pour gérer les risques, adopter les bonnes thérapies et éviter de prolonger inutilement le séjour du patient. Plusieurs tests et analyses permettent d’orienter l’infirmière. Ils permettent d’évaluer la condition clinique du patient, de déterminer la substance toxique et son antidote au besoin, puis d’anticiper l’évolution de l’état du patient.
Des protocoles encadrent aussi les traitements pharmacologiques. La prise en charge rapide d’un patient en état d’intoxication est cruciale, car elle permet de prévenir les complications. Chez tous les patients intoxiqués ou lorsqu’une intoxication est suspectée, une attention doit rapidement être portée aux voies respiratoires, à la respiration ainsi qu’à la circulation sanguine.
Prise en charge
Plusieurs interventions sont réalisées selon la situation clinique du patient et la substance consommée: pratiques de décontamination gastro-intestinale, réanimation liquidienne et contrôles sanguins réguliers.
Une référence en psychiatrie peut aussi être appropriée.
Plusieurs intoxications nécessitent l’administration d’un antidote. Tel que le traitement d’une intoxication à l’acétaminophène comprend une décontamination et l’administration de l’antidote, la N-acétylcystéine (NAC), l’objectif étant d’éviter une hépatotoxicité qui pourrait aller jusqu’à une greffe hépatique.
Une surveillance accrue doit être exercée à l'urgence par l’infirmière afin de déceler tout changement dans l’état du patient qui pourrait indiquer un autre problème de santé ou une aggravation de sa condition.
Les interventions et la surveillance de l’évolution des signes et des symptômes sont nécessaires, vu qu'un diagnostic et des procédures rapidement mises en place réduisent les risques de conséquences néfastes, les risques de complications demeurent à plus long terme.
Collaboration
La collaboration avec le Centre antipoison du Québec (CAPQ) est précieuse lors de la prise en charge d'un patient intoxiqué. L’équipe du CAPQ peut guider l’équipe soignante, car grâce à son expertise, elle peut associer certaines manifestations cliniques à différentes substances toxiques, ce qui permet ainsi d’optimiser la surveillance d’un patient intoxiqué, de déterminer les traitements à initier et de prévenir les complications.
La collaboration interprofessionnelle entre les membres de l’équipe soignante est également essentielle. L’infirmière assurant la surveillance du patient doit aviser l’urgentologue aussitôt qu’elle détecte une anomalie ou un changement clinique, ce qui accélérera le traitement et préviendra les complications. Comme, l’infirmière d’un patient intoxiqué par bêtabloqueurs doit demeurer alerte aux modifications apparaissant sur l’électrocardiogramme en vue de prévenir les arythmies létales.
L’équipe soignante étant multidisciplinaire, il est essentiel de clarifier le rôle de chaque professionnel.
La valorisation du rôle et de l’expertise de chaque professionnel permet d’optimiser la trajectoire de soins du patient. Dans le cas d’une intoxication médicamenteuse, l’expertise du pharmacien servira à déterminer quand le patient pourra reprendre sa médication de façon sécuritaire. Le pharmacien devrait systématiquement être impliqué dans ces dossiers.
Formation infirmière
Certains milieux comme l’urgence en établissement hospitalier sont pour certaines infirmières une source d’anxiété suscitant des difficultés à cibler les éléments de surveillance appropriés et à anticiper les complications possibles. Grâce à l’encadrement par des infirmières d’expérience, l’apprentissage expérientiel permet aux infirmières novices de développer leurs compétences et leur jugement clinique.
Le soutien et l’accès à la formation encouragent le développement des compétences infirmières et contribuent à l’amélioration de la qualité des soins.
Le fait de sensibiliser et de former les infirmières aux méthodes d’intervention auprès des patients intoxiqués facilite l’établissement d’une alliance thérapeutique.
Les infirmières acquièrent des compétences leur permettant de réguler les émotions négatives et d’anticiper les risques de violence, notamment par une écoute active et un engagement vers le rétablissement.
Lors de la prise en charge d’un patient intoxiqué, l’infirmière doit évaluer la condition physique et mentale d’une personne symptomatique et exercer une surveillance clinique de la condition des personnes dont l’état de santé présente des risques incluant le monitorage et les ajustements du plan thérapeutique infirmier.
La prise en charge et la surveillance infirmière des patients se présentant à l’urgence en raison d’une intoxication requièrent une expertise et une collaboration interprofessionnelle.
Ressource pour les professionnels de la santé: contact@infopoison.ca (Association canadienne des centres antipoison et de toxicologie).
Ressources
- OIIQ
- INSPQ
- Association canadienne pour centres antipoison et toxicologie clinique (infopoison.ca)
- Guide canadien des antidotes en toxicologie d’urgence.
- Santé mentale au Québec : Utilisation de l’urgence au Québec des patients avec des troubles mentaux incluant les troubles liés aux substances psychoactives.