Pharmacovigilance infirmière à l’urgence

Pharmacovigilance infirmière à l’urgence

Les principaux effets indésirables des médicaments les plus souvent vus en clinique sont généralement connus des infirmières. L’implication active des infirmières en pharmacovigilance est très importante pour les patients en contribuant à la prévention d’événements indésirables. Les patients fréquentant les urgences sont plus à risque de s’y présenter en raison d’effets indésirables, puis de retourner à domicile munis d’une nouvelle prescription médicamenteuse.

La majorité des maladies chroniques requièrent la prise de plusieurs médicaments afin que les objectifs de traitement soient atteints, ce qui entraîne souvent la consommation multiple de médicaments chez un même individu. La polymédication réfère généralement à la consommation de cinq médicaments ou plus. Plus la consommation de médicaments s’accroît, plus les effets indésirables risquent d’être nombreux.

Dans un sondage de Statistique Canada mené en 2008, 27 % des aînés ont affirmé prendre cinq médicaments et plus quotidiennement. Plus de la moitié parmi ceux-ci ont rapporté avoir eu au moins un effet indésirable nécessitant l’utilisation de services de santé. En 2012, les effets indésirables représentaient 12 % des motifs de consultation aux urgences ontariennes, et 68 % de ces visites étaient considérées comme évitables.

D'où l’importance de bien identifier les étiologies médicamenteuses lors des consultations à l’urgence en vue d’éviter des réadmissions.

L'étiologie médicamenteuse

L’étiologie médicamenteuse d’un événement n’est pas toujours facile à déterminer.

Exemple, une chute, les facteurs contribuants sont multiples, mais il ne faut pas négliger le rôle qui joue la médication.

Comme l'antihypertenseur qui peut causer une hypotension orthostatique, un antidiabétique qui peut faire l'hypoglycémie, les diurétiques qui peuvent induire une déshydratation..

On peut avoir aussi une perte d'équilibre qui peut être d'origine accidentelle qui n'est pas relié à la condition de santé ou la prise de médicaments. Par contre il ne faut jamais exclure la composante médicamenteuse dans la prise en charge à l’urgence des personnes âgées ayant chuté, surtout si l’on constate un ajout ou de récents changements dans la médication (≤ 2 semaines).

Pharmacovigilance infirmière à l’urgence

La pharmacovigilance regroupe les actions exercées en vue d’assurer la surveillance, l’évaluation, la prévention et la gestion des effets indésirables des médicaments.

Connaître l’histoire médicale et le portrait clinique du patient est essentiel.

L’analyse de l’imputabilité et la gestion de la médication potentiellement responsable de l’effet indésirable peuvent parfois être un défi, surtout si les effets indésirables se révèlent complexes ou si les médicaments procurent des bienfaits qui dépassent ses impacts négatifs.

Exemple de médicament, le furosémide: entraîne de nombreux effets indésirables potentiels (par exemple : hypokaliémie, déshydratation, insuffisance rénale aiguë et hypotension), mais les bienfaits qu’il apporte dans la gestion de l’insuffisance cardiaque surpasseraient largement les méfaits chez la plupart des patients. . Si le furosémide était en cause dans un effet indésirable, la majorité des médecins préféreraient contrebalancer cet effet – en ajoutant un supplément potassique en cas d’hypokaliémie ou en diminuant la dose en cas d’hypotension ou de déshydratation –, plutôt que de cesser le médicament complètement.

Le rapport entre les bénéfices et les risques des médicaments doit donc toujours être pris en considération.

Avant de réduire, de cesser ou de remplacer un médicament soupçonné d’effet indésirable, c'est important de réévaluer les raisons initiales de son instauration et de tenir compte des bienfaits observés sur la maladie chronique.

Rôle infirmier en pharmacovigilance

L’inclusion de la médication dans l’évaluation infirmière à l’urgence respecte les stratégies d’intervention du cadre de référence ministériel intitulé Approche adaptée à la personne âgée en milieu hospitalier (MSSS, 2011). En évaluant la situation de la personne âgée, les infirmières s’assurent d’une prise en charge optimale et globale.

La collaboration entre les infirmières et les autres professionnels de la santé est nécessaire pour la prise en charge du patient, y compris pour l’évaluation du rôle des médicaments dans la survenue d’un effet indésirable ayant mené à une visite à l’urgence.

Les infirmières à l’urgence sont dans une position privilégiée pour exercer des activités de pharmacovigilance, car elles interviennent à de multiples niveaux: au triage (des patients ambulatoires ou arrivés en ambulance), au chevet des patients et lors de l’évaluation en vue du maintien à domicile.

Le rehaussement des compétences infirmières en pharmacologie pourrait permettre d’améliorer la qualité des prescriptions médicamenteuses, d’optimiser précocement la prise en charge des patients aux urgences, de détecter les effets indésirables et, enfin, de différencier effets indésirables et événements indésirables.

Intervention en pharmacovigilance

Les infirmières à l’urgence peuvent procéder à plusieurs interventions en pharmacovigilance :

Effectuer une anamnèse complète comprenant une investigation pharmacologique lors de l'évaluation (changements récents de médication, ajout de nouveaux médicaments, prise de nouveaux produits de santé naturels, autres modifications pharmacologiques récentes [≤ 2 semaines]).

Demeurer alerte, lors de l'anamnèse, aux effets indésirables principaux des médicaments les plus rencontrés dans la pratique.

Recommander aux clients, de toujours apporter avec eux, lors de leur visite à l'urgence, les médicaments et les produits de santé naturels qu’ils prennent ou la liste à jour de leur profil pharmacologique afin de vérifier le portrait de leur consommation.

Valider avec le patient les médicaments inutilisés ou inappropriés, afin de procéder éventuellement à une modification (soit cesser ou diminuer) lors de la revue du profil pharmacologique.

Enseigner au patient, au départ, les effets indésirables principaux pouvant survenir et l’inviter à effectuer un suivi complémentaire auprès de son pharmacien de quartier si ces effets se manifestent.

Informer le patient sur la prise optimale des médicaments, de sorte qu’il retire le maximum de bienfaits de son traitement pharmacologique (posologies, raison des médicaments, etc.)

Les infirmières sont des professionnelles autonomes possédant des connaissances propres et une relation privilégiée avec les patients qu’elles côtoient dans leur pratique à l’urgence. Malgré le contexte de soins critiques aigus et les contraintes de temps, les infirmières se doivent d’exercer leur rôle en matière de pharmacovigilance et d’assurer une sécurité médicamenteuse. Elles adaptent leur pratique en approfondissant leurs connaissances pharmacologiques. Ces connaissances sont essentielles afin que leurs patients puissent recevoir des soins de qualité.

Ressources

  • OIIQ

  • MSSS

  • Canadian Institute for Health Information

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